Difficile lorsque l’on évolue dans le monde du transport, d’échapper à des vocables et acronymes devenus courants / ZCR, GNV, dernier kilomètre…
Difficile également de ne pas finir par en faire un sujet unique tant les problématiques finissent par converger.
Nul transporteur n’échappera à la nécessité de se conformer aux contraintes : d’une ZCR, en approche d’un dernier kilomètre, dont le service passera entre autre par l’utilisation d’un véhicule au GNV.
C’est ce constat et ces évolutions que vous invite à partager Jean-Michel MERCIER, Directeur de l’Observatoire du Véhicule Industriel.
ZONE A CIRCULATION RESTREINTE (ZCR) : UNE DEMARCHE CENTRALE DANS L’EVOLUTION DU TRANSPORT EN ZONE URBAINE
« Abandon progressif de l’utilisation des véhicules à combustion fossile, avec un objectif « zéro émission » à horizon 2030 ». Les maires de 12 grandes villes se sont engagés à cela fin octobre lors du Sommet du C40, présidé par Anne Hidalgo, maire de Paris. Pour y parvenir, ils prévoient de montrer l’exemple en achetant uniquement des véhicules à zéro émission pour les flottes municipales, à horizon 2025 et en développant les alternatives pour les citoyens et les entreprises… Les 12 premières villes signataires de cet engagement (soutenues par Tokyo, qui fait figure de précurseur dans ce domaine) sont : Auckland, Barcelone, le Cap, Copenhague, Londres, Los Angeles, Mexico, Milan, Paris, Quito, Seattle et Vancouver.
En effet, parmi les différents secteurs impliqués dans la pollution de l’air, celui des transports représente une part importante des émissions d’oxydes d’azote et de particules fines. Pour compléter les efforts visant à limiter les rejets de polluants par les véhicules, la loi d’août 2015 relative à la Transition Énergétique pour la Croissance Verte (TECV) a donné la possibilité aux collectivités d’adopter des ZCR afin d’interdire ou de restreindre la circulation de véhicules dans un périmètre géographique donné en fonction de leur contribution à la pollution.
Exemple de Paris, où, depuis janvier 2017, il est impossible de se déplacer à Paris sans « sa vignette Crit’Air » sous peine de contravention du fait de l’instauration d’une ZCR.
« Faire de Paris une ville neutre en carbone à l’horizon 2050 : sortir les moteurs diesel d’ici 2024 et les moteurs à essence d’ici 2030 », telles sont les ambitions affichées par la Mairie de Paris dans son nouveau plan Climat Air Énergie.
La ville de Grenoble a également mis en place ce système depuis novembre 2016, où à partir de 5 jours consécutifs de pic de pollution, seuls les véhicules munis d’une vignette Crit’Air ont le droit de circuler. Le préfet du département du Rhône a pris la même décision concernant la ville de Lyon, le 12 décembre dernier.
Ces initiatives ont inspiré d’autres villes ou communautés de communes françaises, qui ont répondu à l’appel à projet national “Ville respirable en 5 ans”. Selon le site Crit’Air, ces 22 ensembles de communes ont jusqu’à 2020 “pour mettre en place des mesures concrètes afin d’améliorer la qualité de l’air à court et long terme, et ce précisément par la mise en place de zones à circulation restreinte (ZCR)”. Chaque ZCR sera délimitée par un arrêté qui en détermine les catégories de véhicules concernées et fixe les mesures (géographiques et temporelles) de restriction applicables.
D’autres villes en perspectives
17 collectivités sont ainsi aidées par l’État et bénéficieront d’un appui financier et méthodologique de la part des services de l’État et de l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie – ADEME.
Et 12 zones sont sous haute surveillance
Nice, Marseille, Toulon, Paris, Vallée de l’Arve, Grenoble, Lyon, Montpellier, Toulouse, Reims, Strasbourg, Saint-Etienne. Les préfets concernés doivent remettre des feuilles de route contenant des mesures concrètes pour améliorer la qualité de l’air et à court terme, au ministre de la Transition Ecologique et solidaire Nicolas Hulot avant le 31 mars 2018.
C’EST DONC DANS CE CONTEXTE QUE LA PROBLEMATIQUE DU DERNIER KILOMETRE EST DEVENU UN SUJET CENTRAL
Le marché de la livraison au client final est en effet à un tournant. La bataille du « dernier kilomètre », cet espace qui sépare les plateformes logistiques du client final, est engagée. L’enjeu : la croissance d’un marché des ventes sur Internet qui a dépassé les 57 milliards d’euros en 2014 et qui progresse encore de près de 10 % par an. Complexe, coûteux, mais facteur clé de succès de toute stratégie de distribution, le dernier kilomètre est, aujourd’hui plus que jamais, au centre de toutes les attentions.
Les mutations de la livraison du dernier kilomètre n’en sont encore qu’à leur début. Le paysage est amené à poursuivre sa transformation : d’un côté, les innovations technologiques (intelligence artificielle, internet des objets, géolocalisation, …) vont de nouveau bouleverser les attentes des consommateurs en termes « d’immédiateté » et de diversité des modes de livraison. De l’autre côté, les enjeux urbanistiques rebattent les cartes à la fois de la distribution physique mais aussi du e-commerce et de son corollaire : la livraison au client final.
Pour séduire les acheteurs en ligne, les distributeurs doivent proposer un niveau de service à la hauteur des attentes des consommateurs. La course à l’innovation est lancée : livraison de colis par drone, dans un coffre de voiture, sur les rayons d’un supermarché, chez son pressing ou en consigne automatisée.
DES MESURES ORGANISATIONNELLES …
….ET UNE REPONSE IMMEDIATE POUR LE PARC DE VEHICULES
Pour répondre à l’évolution progressive des besoins de mobilité en environnement contraint et à la problématique du dernier kilomètre, le GNV est apparu comme étant l’énergie adéquate, même si nombreux sont les spécialistes indiquant que les véhicules thermiques norme Euro 6 apportent déjà une bonne réponse.
Des efforts importants ont été réalisés par l’ensemble du secteur des transports au cours des 25 dernières années pour diminuer les émissions de polluants, avec des progrès significatifs, notamment pour les véhicules lourds : entre la norme Euro I instaurée en 1993 et la norme Euro VI qui est entrée en vigueur en 2014, les seuils d’émissions des particules ont été divisés par 36, ceux des oxydes d’azote par 22, ceux des hydrocarbures imbrulés par 9 et ceux du monoxyde de carbone par 3 par rapport aux émissions de 1990. En 2014, les émissions de CO2 transport par la route étaient évaluées à 126 millions de tonnes, dont 70 Mt pour les véhicules particuliers, 25 Mt pour les utilitaires et 30 Mt pour les véhicules lourds (SOeS – Chiffres clés du transport – édition 2017)
LE VEHICULE GAZ, UNE TECHNOLOGIE OPPORTUNE POUR CONTRIBUER A RELEVER LES DEFIS DU TRANSPORT URBAIN
Les véhicules GNV émettent, sans recours à des systèmes de dépollution multiples et complexes, des quantités de polluants inférieures aux seuils de la norme Euro VI. Ce bénéfice peut être amplifié par l’incorporation de biométhane carburant (bioGNV) dans le mix gazier (le bioGNV permet en effet de réduire jusqu’à 80% des émissions de GES en analyse dite du puits-à-la-roue, c’est-à-dire de la production au pot d’échappement). L’intégration de bioGNV dans le mix GNV ne demandant aucune modification moteur ni aucune adaptation des installations de remplissage, l’ensemble des investissements consentis aujourd’hui pour le développement du GNV est compatible avec une incorporation progressive de bioGNV.
Les performances sanitaires et environnementales des véhicules GNV sont aujourd’hui reconnues par les pouvoirs publics, en leur attribuant la classe 1 des certificats CRIT’AIR ou encore en les catégorisant comme véhicules « à faibles niveaux d’émissions » sur le segment des véhicules de plus de 3,5 tonnes.
La filière GNV/ bioGNV participe également au développement des territoires :
- Par la création d’emplois locaux, que ce soit dans la filière méthanisation, la construction des stations d’avitaillement ou plus globalement par le développement d’une nouvelle filière industrielle d’excellence en France.
- Par ailleurs les motorisations au gaz naturel présentent l’avantage de diminuer par deux les émissions sonores par rapport aux motorisations à allumage par compression, apportant ainsi davantage de souplesse en matière de livraisons des marchandises en dehors des horaires diurnes, ce qui pourrait contribuer au décongestionnement du trafic urbain.
Actuellement, la filière française du GNV bénéficie d’une forte dynamique qui la place en position de leader au niveau européen sur le développement des poids-lourds gaz, dorénavant devant l’Allemagne, l’Italie et la Suède : plus du double des immatriculations de poids lourds GNV en 2016 par rapport à 2015 (+130%), plus de 40 nouvelles stations publiques d’avitaillement prévues en 2017.
Sur le segment du TRM, et dans l’environnement réglementaire et fiscal actuel, le GNV se présente comme le seul carburant alternatif économiquement viable et adapté aux besoins des transporteurs (autonomie jusqu’à 600 km pour le GNC et 1 400 km pour le GNL, temps d’avitaillement comparables à ceux du diesel). Le marché est également tiré par une demande croissante des chargeurs pour rouler au GNV – et pour certains d’entre eux au 100% bioGNV- en particulier dans la grande distribution.
Pour poursuivre le développement du gaz dans le secteur des transports, la filière estime qu’il est indispensable de mettre en œuvre les deux mesures suivantes :
- Garantir sur au moins 5 ans l’écart net actuel de TICPE entre le GNV et le diesel pour le TRM et le TRV
- Soutenir l’aide à l’achat des véhicules GNV
La Loi de Finances pour 2016 a ouvert un droit à un suramortissement de 40 % de la valeur d’acquisition pour les véhicules GNV d’un poids strictement supérieur à 3,5 tonnes entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2017 (avantage étendu aux véhicules de 3,5 tonnes en 2017). La mesure permet à une entreprise de déduire de son résultat imposable un montant égal à 40% de la valeur du véhicule dans lequel elle a investi, déduction appliquée linéairement sur l’ensemble de la durée de vie du véhicule.
Cette mesure s’est révélée être un véritable accélérateur pour les ventes de poids-lourds GNV en incitant économiquement les transporteurs à investir dans des véhicules gaz : elle compense en pratique la moitié du surcoût à l’achat d’un poids-lourd GNV qui est aujourd’hui supérieur de 20 à 30% à un poids-lourd à motorisation diesel.
Pérenniser une aide à l’achat des véhicules GNV est en effet nécessaire à court et moyen terme. Au-delà de la prise en charge du surcoût propre aux motorisations gaz, elle envoie un signal clair aux transporteurs qui s’engagent sur plusieurs années dans des investissements importants, qui plus est dans un milieu fortement concurrentiel.